21 mars 2020

Nous sauvons tous des vies

Par la Dre Diane Francoeur, présidente de la FMSQ

Jusqu’à maintenant, la réponse des Québécois est extraordinaire. L’appel au confinement est largement suivi. Il faut se rappeler et se redire qu’en agissant ainsi, nous sauvons tous des vies. Il faut tenir bon. Les circonstances appellent au courage et à la solidarité.

Elles appellent aussi à la lucidité. Le pire est à venir. La situation se détériorera avant de s’améliorer. Les mesures de confinement ne bloqueront pas la maladie. Le coronavirus est présent au Québec et il se propage. Tous les efforts mis de l’avant visent donc à freiner sa propagation.

Si nous travaillons bien, nous pourrons faire face à une crue des eaux ; si nous relâchons, nous serons submergés par un tsunami.

Selon toute probabilité, il y a déjà au Québec une propagation locale ; c’est-à-dire une transmission entre personnes qui ne sont pas allées à l’étranger ou qui n’ont pas été en contact avec des voyageurs. Nous ne le savons pas encore de manière certaine, parce que les tests sont effectués de façon prioritaire sur les personnes qui arrivent de voyage et parce que le virus peut être transmis par des porteurs qui n’ont aucun symptôme.

Nous sommes devant un ennemi qui n’a ni appartenance ni loyauté. Il a été chinois, il est européen, il sera américain. Il n’a pas de programme et pas de direction. Il entre là où on lui ouvre la porte. Il faut gagner du temps, parce que le temps sauve des vies, et parce que le temps nous permet de nous préparer.

Toutes les ressources médicales et hospitalières se mobilisent pour faire face à l’augmentation du nombre de personnes qui se retrouveront en grave difficulté respiratoire. Cette réorganisation des services de santé a pour conséquence de repousser des interventions non urgentes.

Dans ce mouvement, des médecins voient leurs activités régulières suspendues ou réservées aux cas jugés urgents. Les médecins spécialistes sont d’abord des médecins formés en médecine générale. Cela peut parfois faire un certain temps et les connaissances scientifiques et médicales se renouvellent aux huit ans. Ils et elles sont prêts à mettre l’épaule à la roue.

La COVID-19 est un virus inconnu, mais qui fait partie d’une famille qui, elle, est connue. Cela implique deux choses importantes :

  • La première, c’est qu’il nous réserve des surprises. Il y a, par exemple, des variations importantes entre les profils des populations les plus touchées selon les différentes régions du monde
  • La deuxième, c’est que la famille des coronavirus faisait déjà l’objet de recherches. La science ne part pas à zéro et des laboratoires travaillent déjà sur des vaccins. L’espoir est réel, mais il ne faut pas minimiser le défi scientifique. Aucun vaccin n’a encore permis de contrer une infection de type coronavirus. Les épidémies précédentes (SRAS, MERS) ont été contenues. Le traitement médical a consisté à soulager les symptômes. Sans plus

À l’échelle mondiale, les communautés scientifiques sont en contact étroit et partagent les connaissances. Chez nous, la FMSQ met sur pied une plateforme accessible à ses membres pour assurer la diffusion la plus rapide possible des avancées scientifiques et appliquer sans délai les meilleures approches thérapeutiques.

Nous sommes littéralement en temps de guerre. Pas les uns contre les autres, mais tous unis contre un même mal. 

Nous sommes tous en état de choc devant la prise de conscience brutale de la fragilité de nos sociétés.

Mais nous avons des avantages énormes par rapport aux autres générations qui ont été confrontées à des fléaux de la sorte. Nous avons la science médicale qui a fait des progrès remarquables. Nous avons des États pleinement constitués capables de protéger le bien commun et de déployer des ressources pour atténuer les contrecoups sociaux de l’arrêt subit des activités économiques.

Nous avons un système public de santé robuste qui excelle une fois qu’on y est entré. Enfin, nous avons des moyens technologiques qui nous permettent de nous voir et de nous dire « je t’aime » malgré le confinement.

 

Montréal, le 21 mars 2020

 

Cette lettre d'opinion a été publiée dans La Presse
Article paru dans La Presse « Il faut tenir bon »