Réforme du système de santé : l’écoute n’est pas au rendez-vous

Monsieur le Ministre,

Il n'y a pas de mot assez fort pour décrire mon inquiétude face à la crise que traverse notre système de santé. Pourtant, il y a un an déjà nous lancions un cri d'alarme. Aujourd’hui, la vérité est que nous allons toujours droit dans le mur, que votre réforme ne réglera pas grand-chose et que nos patients en seront les premières victimes.

La dégradation du réseau se poursuit

Au printemps 2022, alors que vous déposiez votre Plan Santé, j’ai eu espoir que vous et vos équipes étiez réellement à l'écoute afin de rebâtir un réseau robuste au profit d’un meilleur accès aux soins. Nous étions alors tous à la défense de la même cause : les patients.

Plusieurs mois plus tard, nos 11 000 membres sont pourtant encore confrontés quotidiennement à une incapacité croissante à prodiguer des soins à la population. Les soignants font face à une pression insoutenable. En réponse, votre gouvernement ne semble pas écouter ni considérer ces derniers. Notre système de santé, que nous tenons à bout de bras pour nos patients, tourne au ralenti et, ultimement, ce sont eux qui en paient le prix.

Projet de loi 15 :  un traitement inadéquat

Face à un réseau toujours plus dysfonctionnel, manquant cruellement de personnel et utilisant des technologies désuètes, vous avez fait le choix délibéré de sortir ceux qui prodiguent les soins spécialisés des cercles de décisions et de leur imposer un carcan bureaucratique en déposant le projet de loi 15.

Comment nos patients pourront-ils encore bénéficier des meilleurs soins sans l’implication du corps médical dans l’organisation clinique de ces derniers ? Comment espère-t-on prendre des décisions alignées sur les besoins de nos patients avec un CA centralisé et isolé des réalités et préoccupations locales ? Comment offrir des soins bonifiés à la population sans tenir compte de l’expertise médicale ?

Notre constat est clair : le projet de loi 15, plutôt que résoudre les problèmes, va les aggraver. La centralisation des décisions, la dilution de l’expertise médicale et la bureaucratisation ne profiteront en rien à nos patients.

Moins de bureaucratie, plus de soins

Nous insistons sur la nécessité de prendre immédiatement au sérieux les professionnels de la santé et tenir compte des amendements proposés par les fédérations médicales en grande majorité ignorés jusqu’ici. Autre preuve d’un immobilisme manifeste, à cause de l’énergie dépensée par vos fonctionnaires à défendre cette réforme, plus de cinquante projets structurants, déjà financés à hauteur d'un milliard de dollars par les médecins, sont actuellement en suspens, et des centaines de propositions et demandes acheminées aux PDG d’établissements pour améliorer le fonctionnement du réseau de la santé sont ignorées.

Plus grave encore, on apprenait la semaine dernière que le plan de rattrapage des chirurgies faisait du sur-place parce que la simple directive de terminer les programmes opératoires n’avait pas été transmise aux établissements et ce, cinq mois après la conclusion de l’entente !

Nos solutions peuvent être mises en œuvre dès maintenant. Les débats de structures peuvent attendre. Pas les patients.

Montréal, 24 octobre 2023