Projet de loi no 45 Loi concernant principalement la nomination et le mandat des coroners et du coroner en chef : commentaires de la FMSQ

Lettre transmise par courriel à Monsieur André Bachand, président de la Commission des institutions (copie conforme à Mme Geneviève Guilbault, vice-première ministre)
Monsieur le président,
L’expertise médicale et le rôle du coroner sont complémentaires dans la recherche des causes et des circonstances d’un décès. Conséquemment, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (ci-après « la Fédération ») accueille favorablement le projet de loi n°45 : Loi concernant principalement la nomination et le mandat des coroner et du coroner en chef qui vise l’actualisation de la législation applicable et souhaite vous soumettre certains commentaires.
Protection des enfants
Les travaux de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse nous rappellent l’importance d’offrir aux enfants un environnement sain et sécuritaire dans lequel chacun peut s‘épanouir. Un service de garde est un lieu où l’enfant devrait être bien encadré et dans lequel tous les moyens devraient être déployés pour assurer sa santé et sa sécurité. Tout décès d’un enfant survenant alors qu’il est sous la garde d’un prestataire de services de garde devrait impérativement faire l’objet d’une investigation en profondeur pour s’assurer qu’une telle situation potentiellement évitable ne se reproduise plus jamais. En ce sens, nous saluons les ajouts apportés à l’article 39 du projet de loi.
Décès maternel
La Fédération appuie également la proposition émise par la Collège des médecins du Québec à l’effet que les décès qui surviennent dans le cadre d’une grossesse, ou dans les 42 jours suivant l’accouchement fassent l’objet d’un avis obligatoire au coroner. Bien que la mortalité maternelle s’avère extrêmement rare au Québec, les informations regroupées dans le cadre de ses investigations pourraient permettre de guider l’orientation de recommandations visant ainsi à réduire davantage le nombre de décès maternels et à mieux en comprendre les causes. La Fédération encourage l’amélioration constante des pratiques médicales visant à assurer la dispensation de soins de santé des plus sécuritaires.
Communication essentielle
En matière d’expertise médicale, la communication et l’accessibilité du dossier médical est essentielle. Malheureusement, l’environnement technologique dans lequel exercent les professionnels de la santé au Québec est désuet et limitatif. À ce jour, le télécopieur demeure l’outil principal de communication dans le réseau de la santé. De plus, l’implantation du Dossier santé Québec demeure inachevée et le résumé d’hospitalisation n’est pas disponible en temps réel. Pour accomplir adéquatement leur mandat et leurs responsabilités, les médecins ont besoin d’un accès rapide et efficace au dossier médical complet de la personne décédée. À l’heure actuelle, cette documentation est souvent difficile à obtenir et cela engendre parfois des délais, voire même l’impossibilité de formuler un diagnostic ou de compléter le rapport d’expertise. Il devient urgent de doter les patients d’un seul dossier médical électronique accessible en tout temps et qu’une plateforme de communication électronique sécuritaire et approuvée soit implantée au Québec. La persistance de ces problèmes de communication dans le domaine de la santé est inacceptable et le gouvernement doit y remédier rapidement. Par ailleurs, le projet de loi devrait prévoir une disposition explicite visant à faciliter l’accès à l’ensemble des informations médicales et du dossier médical de la personne décédée au médecin en charge de l’expertise.
Prélèvement requis pour une expertise
L’article 21 du projet de loi apporte un changement intéressant en introduisant la possibilité à tout professionnel habilité par la loi, plutôt qu’à un médecin seulement, d’effectuer sur un corps un prélèvement requis pour une expertise ordonnée par le coroner. De plus, un récent amendement adopté étend même cette possibilité à toute personne titulaire d’un permis de thanatopraxie. Ces autres professionnels devront par conséquent nécessairement être habilités à effectuer ces prélèvements en vertu d’une autre source législative ou règlementaire afin de s’assurer qu’ils détiennent la compétence pour procéder à cet acte et qu’ils soient en mesure de collaborer efficacement avec l’expert mandaté pour la réalisation de l’expertise.
Conservation d’un organe ou d’un tissu
L’article 22 du projet de loi ajoute une nouvelle obligation au médecin qui procède à une autopsie et qui conserve un organe ou un tissu aux fins d’une expertise d’aviser le coroner afin que ce dernier puisse en informer la personne qui réclame le corps de la personne décédée. Afin de facilité la documentation et la transmission de ces informations au coroner, nous suggérons fortement la modification du formulaire de demande d’autopsie adressée au médecin afin d’y inclure une section relative à la conservation des organes et des tissus.
Par ailleurs, cette nouvelle disposition prévoit que si l’identité de la personne décédée n’a pu être établie, un échantillon d’organe ou de tissu doit être conservé à la demande du coroner en vue de son identification future. Nous sommes d’avis que la disposition devrait également traiter de la durée de conservation de ces organes et tissus.
Nous vous remercions de l’attention que vous porterez à nos commentaires et vous prions d’agréer, monsieur le président, nos salutations distinguées.
La présidente,
Diane Francoeur, M.D., FRCSC, MHCM