Dossier santé

Maladies du foie : traiter à l’aide des cellules souches

Au Canada, une personne sur 10 vit avec une maladie du foie. Quelque 5000 personnes en décèdent chaque année, tandis qu’à peine 400 bénéficient d’une greffe du foie. De telles statistiques sur la santé publique contribuent à motiver le Dr Massimiliano Paganelli dans ses recherches.

Il existe peu de traitement pour guérir un foie malade. La transplantation hépatique est la solution première à l’insuffisance hépatique aiguë ou chronique.

Malheureusement, les dons d’organes ne répondent pas à la demande, d’où la nécessité d’accentuer la recherche sur les cellules souches. C’est ici que la science-fiction pourrait bientôt céder le pas à la réalité.

Les travaux en hépatologie du Dr Massimiliano Paganelli, clinicien-chercheur au CHU Sainte-Justine, et de son équipe portent sur le traitement des maladies génétiques rares, ou orphelines, ainsi que de l’insuffisance hépatique aiguë et chronique.

Les maladies du foie et leurs traitements

Les maladies orphelines du foie sont caractérisées par une mutation de l’ADN qui provoque une déficience de l’organe ayant des conséquences importantes dans tout le corps. Le foie est gravement endommagé à cause des lésions hépatiques, ce qui entraîne des complications graves et, souvent, la mort du jeune patient.

Comme très peu de médicaments permettent de traiter ces maladies, la transplantation représente, la plupart du temps, la seule solution possible.

L’insuffisance hépatique, quant à elle, résulte généralement de l’évolution de plusieurs maladies du foie. Responsable de complications graves, comme l’encéphalopathie hépatique ou l’ascite, elle cause des milliers de décès chaque année au Canada. Dans ce cas-ci aussi, la transplantation est le traitement de choix.

Cependant, les complications inhérentes à l’intervention chirurgicale, la nécessité de prendre des médicaments antirejet à vie et la carence de certains organes ont incité les chercheurs à chercher des solutions de rechange.

Deux axes de recherche

Ces constats ont mené à deux principaux axes de recherche actuellement en phase préclinique : 

  1. La création in vitro (en laboratoire) de modèles de maladies rares du foie, pour une meilleure compréhension de leurs mécanismes et la découverte de nouveaux traitements
  2. Le traitement de l’insuffisance hépatique à l’aide de la thérapie cellulaire et de la médecine régénératrice

À partir de cellules souches, des hépatocytes sont générés en laboratoire. Ils servent à étudier des maladies génétiques rares dans le but de découvrir et de tester de nouveaux médicaments. Grâce à cette approche, l’équipe du Dr Paganelli a créé le premier modèle in vitro de tyrosinémie de type 1, une maladie hépatique rare, mais particulièrement courante au Québec.

Pour ce qui est du deuxième axe, la thérapie cellulaire et la médecine régénératrice pour le traitement de l’insuffisance hépatique aiguë, le laboratoire du Dr Paganelli a conçu une technique pionnière pour encapsuler les organoïdes hépatiques dans un biomatériau de nouvelle génération.

Ces organoïdes sont des cellules qui remplaceront les fonctions du foie le temps nécessaire à l’organe pour se régénérer, sans traitement antirejet. Leur implantation permettra aux patients de bénéficier d’une intervention chirurgicale minimalement invasive plutôt que d’avoir à subir une transplantation.

Les études cliniques devraient s’amorcer dans deux ans. À terme, ce traitement pourrait sauver la vie de milliers d’enfants et d’adultes dans le monde entier. Cependant, afin de ne pas donner de faux espoirs aux patients, le Dr Paganelli précise qu’il s’agit pour l’instant d’études chez les animaux.

Des fonds pour faire avancer la recherche

Les travaux du Dr Massimiliano Paganelli sont si impressionnants qu’il a été le premier chercheur hors des États-Unis à recevoir le Gilead Science 2015 International Research Scholars Program in Liver Disease Award – The Americas.

Ce prix est non seulement prestigieux et convoité, mais reconnu comme éthique. En effet, la compagnie biopharmaceutique qui le décerne ne joue aucun rôle dans la recherche, et toute utilisation de ses produits est interdite.

L’effet de levier de ce premier financement a été extraordinaire, et d’autres appuis n’ont pas tardé à suivre. Le financement le plus important pour le projet des organoïdes est venu du Réseau de cellules souches.

Les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont ensuite emboîté le pas en lui octroyant, en 2017, une subvention de chercheur en début de carrière en santé génésique et en santé des mères, des enfants et des adolescents. Puis, plus récemment, ils lui ont offert une bourse de près d’un demi-million de dollars dans le cadre du programme de subventions Projet.

La Fondation du CHU Sainte-Justine et le Réseau de thérapie cellulaire, tissulaire et génique du Québec ont aussi soutenu ses projets, ainsi que le Fonds de recherche du Québec – Santé. Enfin, le ministère de l’Économie et de l’Innovation a favorisé la transition de ses découvertes vers l’industrie.